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Alice, Arsène, Jamie, Thursday... et les autres
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Alice, Arsène, Jamie, Thursday... et les autres
6 avril 2007

Il faut qu'on parle de ce livre !!!

Voici déjà quelques mois que ce livre est paru. De prime abord l'histoire -celle d'un gamin de seize ans, auteur d'une tuerie dans son lycée aux Etats-Unis - ne m'inspirait pas plus que ça. "Encore un roman basé sur un fait divers", pensé-je.

Et puis j'ai vu fleurir, dans la presse et sur Internet, des critiques passionnées. Certaines très enthousiastes, d'autres beaucoup plus négatives, mais personne n'était resté indifférent. Alors, puisqu'il était disponible à la bibliothèque à un moment où mon esprit l'était aussi, je me suis lancée... Et dès le début, j'ai été happée par l'écriture de Lionel Shriver...

L'histoire de Kevin Katchadourian (la narratrice insiste lourdement sur l'héritage arménien du "héros", un peu comme s'il portait le poids d'une malédiction lié à ce peuple) est racontée de façon originale : C'est la mère du jeune garçon qui écrit des lettres -qui resteront sans réponse - à son mari dont elle est "séparée". (Ce n'est qu'à la fin du livre qu'on comprendra comment s'est effectuée cette douloureuse séparation.)
Jour après jour, lettre après lettre, elle lui parle et raconte sa vie -leur vie- et l'histoire de Kevin. Elle choisit de commencer bien avant la naissance de l'enfant.
Pourquoi cette femme, directrice d'une société de guides de tourisme, globe-trotter et, à priori peu encline au désir de maternité, s'est retrouvé vouloir un enfant, comme on se lance un défi. Cette notion de de défi, de dépasser ses limites, ses peurs, d'oser faire ce que l'on craint est importante tout au long du récit, car elle se retrouvera aussi dans le caractère du jeune meurtrier.

Dès la naissance de l'enfant, on se rend compte que l'amour maternel n'est pas au rendez-vous et que cet enfant a quelque chose de spécial : il rejette sa mère, cherche toutes les occasions de faire du mal et ne montre aucune des réactions propres à l'enfance : désir, passion, enthousiasme ou rejet. C'est, au contraire, un enfant plutôt passif qui cache son intelligence et ses aptitudes, sous un air d'ennui et de lassitude. Sa vie, comme sa chambre, semble dépouillée. Il ne s'intéresse à rien, mais ne supporte pas la passion chez les autres.En fait il ressemble à un robot monstrueux et déréglé : il fait ce qu'on attend de lui à l'école, mais sans y mettre aucun sentiment et se garde de le faire trop bien, pour rester juste correct.

On finit par se rendre compte que Kevin, qui s'habille exprès avec des vêtements trop étroits, en fait de même avec ses sentiments : il les bride, jusqu'à les déformer. Finalement ce qu'il cherche tant à cacher, n'est-ce pas un amour incestueux pour sa mère, qu'il s'oblige à dissimuler sous tant de haine provocatrice ?
Et l'on en vient à se demander si ce massacre n'a pas été perpétré dans l'unique but d'attirer sur lui l'attention - à défaut de l'amour - de cette mère, qu'il semblait tant rejetter, cette mère désormais seule avec lui, seule jugée digne d'être spectatrice de ses actes...
Un psy parlerait d'OEdipe mal assumé. On reste perplexe devant cet enfant si froid, si calcutateur et pourtant si désespéré. Peu à peu on se met à la place de la mère, qui malgré toutes les ignominies commises, est prête à accueillir son fils lorsqu'il sortira de prison.

Le roman semble construit de façon linéaire, mais par son style même il cache un suspense effroyablement ingénieux. Impossible d'en parler davantage sans le déflorer, ce qui serait dommage. Je vous engage vivement à vous plonger dans ce roman dérangeant, qui aborde le thème de la responsabilité des parents par rapport aux actes commis par leurs enfants et la question du remord et du pardon.
Vous n'en ressortirez pas indemnes.

kevin

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